Vieillissement et fin de vie

Les personnes ayant une déficience intellectuelle vivent maintenant beaucoup plus longtemps qu’avant. Cependant, elles vieillissent souvent plus tôt que les autres, souvent dès l’âge de 40 ans, ce qui pose plusieurs défis, notamment pour les soins de santé, les services sociaux, les services et les questions éthiques.

Il est important d’adopter une approche adaptée aux personnes ayant une déficience intellectuelle pour leur permettre de vieillir et de vivre leur fin de vie avec dignité.

De plus, les changements de lois et les débats sociaux sur l’aide médicale à mourir, au cours des dernières années, nous amènent à réfléchir à des questions importantes comme le respect de la personne, sa capacité à donner un vrai consentement et les préjugés liés aux limitations (capacitisme).

Projet ReVie

Au Québec, les personnes vieillissantes autistes ou avec une déficience intellectuelle vivent souvent des difficultés d’accès aux services, de transitions entre milieux de vie et de maintien d’habitudes de vie saines. 

Pour répondre à ces défis, en 2021, l’organisme Sans Oublier le Sourire a initié la première phase du Projet ReVie en collaboration avec plusieurs partenaires.

La deuxième phase du Projet ReVie est pilotée par un nouveau comité porteur, composé de la Fédération québécoise de l’autisme, d’Élise Milot (professeure et chercheuse en travail social, Université de Laval), de Proche Aidance Québec et de la Société québécoise de la déficience intellectuelle. 

Le nouveau comité porteur a été formé avec deux intentions principales :

  • promouvoir l’enjeu du vieillissement des personnes autistes ou ayant une déficience intellectuelle à l’échelle provinciale;
  • mobiliser les connaissances et les expertises issues des réseaux de chacune des organisations afin de développer une compréhension commune des enjeux vécus par les personnes vieillissantes autistes et/ou avec une déficience intellectuelle.

logo du projet ReVie

Le nombre d’adultes vieillissants avec une déficience intellectuelle est en croissance. Pourtant, on comprend encore mal leurs besoins particuliers. Il est essentiel de mieux connaître leur réalité et de créer des programmes pour mieux les accompagner.

Aussi, il existe peu de milieux de vie adaptés pour ces personnes. C’est une question importante, surtout parce que plusieurs d’entre elles vivent encore avec leurs parents… qui vieillissent aussi.


Demandes

Le gouvernement du Québec devrait :

  • encourager la recherche et le partage de nouvelles connaissances sur les personnes vieillissantes ayant une déficience intellectuelle
  • sensibiliser le personnel des organismes et ministères du Québec aux besoins particuliers de cette population
  • mettre en place des services adaptés, surtout en ce qui concerne les milieux de vie, pour aider à la fois les personnes concernées et leurs familles
soins palliatifs

 Dans le passé, les droits à la santé et à la vie des personnes ayant une déficience intellectuelle n’ont pas toujours été respectés, surtout lorsqu’elles avaient des maladies graves ou dégénératives.

Même si leur espérance de vie a beaucoup augmenté dans les dernières décennies, ces personnes meurent encore plus souvent de causes évitables (Trollor et al., 2017), car elles ne reçoivent pas toujours les soins ou l’accompagnement dont elles ont besoin dans le système de santé et de services sociaux.

Elles sont aussi plus à risque de développer certaines maladies graves plus tôt dans leur vie (Strydom et al., 2007, 2009). C’est pourquoi il est essentiel de bien protéger ces personnes vulnérables dans tout ce qui concerne l’aide médicale à mourir (AMM).

Puisque l’aide médicale à mourir est offerte au Québec et que des discussions sont en cours pour en élargir l’accès, il est très important de s’assurer que les personnes vulnérables soient protégées de manière juste et sécuritaire.


La situation de handicap ne doit jamais justifier l’aide médicale à mourir.

Pour la SQDI, avoir un handicap ne devrait jamais, à lui seul, justifier le fait d’avoir accès à l’aide médicale à mourir.

Les personnes en situation de handicap font face à des préjugés négatifs (on parle ici de capacitisme), leur vie est souvent moins valorisée par la société, et elles vivent plus souvent dans la pauvreté.

Si certaines vivent de grandes souffrances liées à leur déficience intellectuelle, c’est souvent parce qu’elles ne sont pas bien incluses dans la société et qu’elles n’ont pas accès aux services dont elles ont besoin.

Au lieu d’élargir l’accès à l’aide médicale à mourir, il faut plutôt s’assurer que ces personnes aient les services nécessaires et un niveau de vie adéquat.


Pas de consentement substitué pour les personnes qui ne peuvent consentir elles-mêmes

Pour la SQDI, il est clair qu’une autre personne ne devrait jamais pouvoir décider à la place d’une personne inapte pour demander l’aide médicale à mourir (AMM).

D’abord, l’AMM devrait toujours être basée sur un consentement libre et éclairé, donné directement par la personne concernée.  Mais pour les personnes inaptes, surtout celles ayant une déficience intellectuelle plus sévère, il est souvent difficile de bien comprendre et d’évaluer ce consentement.

Par exemple, ces personnes peuvent ressentir de la tristesse ou de la détresse après la mort d’un proche,  (Chow et al., 2017), mais elles ont généralement plus de difficulté à comprendre que leur propre mort est définitive et irréversible. (Anne Dusart, 2008). 
C’est pourquoi on ne peut pas garantir un vrai consentement libre et éclairé dans ces cas. Et en aucun cas les parents ou les membres de la famille ne devraient pouvoir prendre cette décision sans que la personne concernée ait elle-même donné son accord.


Directives anticipées et consentement

La SQDI a des réserves concernant les directives anticipées pour l’aide médicale à mourir (AMM), même si elles ont été faites par une personne apte à ce moment-là, mais qui est devenue inapte ensuite.

Demander à une autre personne de donner son accord à la place de quelqu’un pour une procédure qui mène à la mort n’est pas la même chose que de demander à refuser des soins, ce qui peut mener à une mort naturelle.

Dans le cas de l’AMM, c’est une autre personne qui donne son accord pour une action qui cause la mort, alors que la personne concernée ne peut plus confirmer si elle est toujours d’accord. Il est donc impossible de savoir si elle maintient son choix.

En comparaison, lorsqu’une personne refuse des soins, c’est elle qui prend directement la décision d’arrêter un traitement, ce qui peut laisser la mort arriver naturellement.Permettre ce type de consentement « par avance » pour l’AMM, même si la personne y avait consenti avant, pose des risques et semble aller à l’encontre du principe fondamental établi par l’arrêt Carter, qui insiste sur l’importance d’un consentement clair et actuel au moment de la procédure.


Un besoin de statistiques et une meilleure surveillance

Les rapports sur l’aide médicale à mourir manquent souvent de précision et ne donnent pas assez de données fiables pour bien comprendre les effets de son ouverture à un plus grand nombre de personnes.

Par exemple, on ne sait pas clairement si les personnes qui demandent l’aide médicale à mourir ont reçu assez de services ou si ces services étaient de bonne qualité.

C’est un problème important, surtout que de plus en plus d’articles montrent que certaines personnes en situation de handicap demandent l’aide médicale à mourir parce qu’elles manquent de services, vivent dans la pauvreté ou sont très isolées.

Les gouvernements doivent donc améliorer la façon dont ils recueillent et analysent ces données.

La Norme sur la protection des personnes vulnérables (Michael Bach et al., 2016) a été créée par des experts, des éthiciens, des médecins et des chercheurs. Elle prévoit des protections supplémentaires pour éviter que des personnes vulnérables reçoivent l’aide médicale à mourir sans avoir donné un consentement libre et éclairé. 

Cette norme est largement approuvée par les groupes représentant les personnes vulnérables à travers le Canada, et la SQDI la soutient également.


Demandes

Les gouvernements du Québec et du Canada devraient :

  • ne pas permettre l’accès à l’aide médicale à mourir simplement en raison d’un handicap, surtout si la personne n’est pas en fin de vie
  • ne pas autoriser l’utilisation du consentement substitué pour les personnes ayant une déficience intellectuelle et étant inaptes
  • ne pas permettre l’utilisation des directives anticipées pour les personnes ayant une déficience intellectuelle
  • mettre en place la Norme sur la protection des personnes vulnérables concernant l’accès à l’aide médicale à mourir pour les personnes ayant une déficience intellectuelle
  • améliorer la collecte de données statistiques sur l’utilisation de l’aide médicale à mourir par les personnes en situation de handicap, en particulier sur les facteurs sociaux et économiques qui influencent leur santé
Soins palliatifs : une personne ayant une déficience intellectuelle est couché dans un lit et des préposés lui offrent des soins

Comme mentionné plus tôt, l’espérance de vie des personnes ayant une déficience intellectuelle a beaucoup augmenté au cours des dernières décennies. Cela amène de nouveaux défis, surtout lorsqu’on parle de la fin de vie et des soins nécessaires pour que ces personnes puissent vivre cette étape dans le respect et la dignité. (Tuffrey-Wijne, 2003).

La Loi sur les soins de fin de vie (Québec, 2014) prévoit que les soins palliatifs fassent partie d’une approche complète pour accompagner les personnes en fin de vie.

Mais en pratique, les soins palliatifs ne sont pas bien développés partout au Québec, (Catherine Hanfield, 2018), peu adaptés aux besoins des personnes ayant une déficience intellectuelle et les fonds pour les offrir ne sont pas suffisants (Cormier, 2018). Résultat : certaines personnes demandent l’aide médicale à mourir parce qu’elles n’ont pas accès aux soins palliatifs dont elles auraient besoin  (Davide Gentile, 2018).

 Il est donc essentiel d’offrir des soins palliatifs de qualité, accessibles et adaptés aux besoins de toutes les personnes, peu importe où elles vivent.


Demandes

Le gouvernement du Québec devrait :

  • investir dans les soins palliatifs et développer de nouveaux modèles de soins palliatifs adaptés aux besoins des personnes ayant une déficience intellectuelle.

Personnes responsables

Karyann Pilon

Karyann Pilon

Coordonnatrice du Projet ReVie

Jean-François Rancourt

Jean-François Rancourt

Analyste aux politiques publiques et conseiller à la défense des droits